Oreille interne

Auteur : Matthieu Thomas • Examinateur : Flora Vezzá
Dernière révision : 7 octobre 2024
Temps de lecture : 20 minutes

Que se passe-t-il après que des vibrations ont été transmises à travers la membrane tympanique puis aux osselets de l’oreille ? Quelles sont les structures impliquées dans la portion suivante du système auditif ?

Les structures de l'oreille interne sont conçues pour convertir l'énergie mécanique transmise sous forme d'ondes générées par les objets environnants en influx neurveux (transduction) qui peuvent être interprétées comme des sons. L'oreille interne joue également un rôle essentiel dans le maintien de l'équilibre postural et de la stabilisation visuelle lorsque l’on regarde un objet unique. Ainsi, l'oreille interne, qui se compose d'une série de cavités interconnectées appelées labyrinthes, peut être divisée en trois parties principales :

La cochlée, qui est responsable de l’ouïe
Le vestibule (composé de l’utricule et du saccule), qui gère l’équilibre à l’arrêt
Les canaux semi-circulaires, qui gèrent l’équilibre en mouvement

Cet article traitera de leur anatomie structurelle macroscopique, de leurs relations spatiales, de leur innervation et de leur vascularisation.

Points clés sur l’oreille interne
Parties	Labyrinthe osseux Vestibule Canaux semi-circulaires Cochlée Labyrinthe membraneux Utricule Saccule Canal cochléaire
Fonctions	Le labyrinthe osseux soutient son homologue membraneux L’utricule et le saccule fournissent des informations sur la position de la tête Les canaux semi-circulaires fournissent des informations sur les mouvements de la tête Le canal cochléaire fournit des informations auditives
Vascularisation	Artère tympanique antérieure Artère stylomastoïdienne Rameau pétreux de l'artère méningée moyenne Artère labyrinthique
Innervation	Nerf vestibulocochléaire (VIII) Nerf cochléaire : Transmet les informations sensorielles de l’audition après sa sortie du ganglion cochléaire Nerf vestibulaire : Transmet les informations de l’équilibre postural

Sommaire

Limites
Cochlée
Vestibule
1. Récessus et communications
2. Structures contenues
Structures semi-circulaires
Vascularisation
1. Artères
2. Veines
Innervation
Points clés
Sources

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Limites

L'oreille interne est enchâssée dans la partie pétreuse de l'os temporal, antérolatéralement à la fosse crânienne postérieure – la paroi médiale de l'oreille moyenne, le promontoire, lui servant de paroi latérale. L'oreille interne est composée d'une partie osseuse et d'une partie membraneuse. La partie osseuse, connue sous le nom de labyrinthe osseux, enveloppe la partie membraneuse, appelée labyrinthe membraneux. La différence de taille entre ces deux labyrinthes implique la présence d’un espace entre eux. Celui-ci est rempli d'un fluide, la périlymphe, dont la composition ionique est similaire à celle du liquide extracellulaire.

La lumière du labyrinthe membraneux contient un autre fluide, l’endolymphe, dont la composition est similaire à celle du cytosol. Ces deux substances (périlymphe et endolymphe) ne communiquent pas entre elles. Il est important de noter que, dans la littérature, la lumière des composants osseux est souvent appelée « canaux » (par exemple, les canaux semi-circulaires), tandis que celui des composants membraneux est appelé « conduits » (par exemple, les conduits semi-circulaires).

Cochlée

La cochlée est la portion antérieure du labyrinthe osseux. Enroulée en spirale, de façon similaire à une coquille d'escargot (du grec cochlos, signifiant escargot), elle est plus épaisse à sa base et s’affine progressivement à chaque spire, jusqu'à se terminer au centre, au niveau de la cupule cochléaire. La cochlée s’enroule autour d'un noyau osseux appelé modiolus, dont la base repose au fond du méat acoustique interne, tandis que l'apex se projette latéralement (vers l'oreille moyenne) le long de l'axe de l'os pétreux. Une fine saillie osseuse, la lame spirale, se projette depuis le modiolus jusque dans le canal cochléaire.

Tout comme le vestibule et les canaux semi-circulaires (décrits ci-dessous), la cochlée est recouverte d'endoste. Elle communique également avec l'oreille moyenne via la fenêtre cochléaire (anciennement appelée fenêtre ronde) qui est recouverte par la membrane tympanique secondaire. La cochlée abrite le canal/conduit cochléaire membraneux, qui est attaché à la fois à la lame spirale et à la paroi de la cochlée, et contient de l'endolymphe. L'endolymphe pénètre dans le canal cochléaire à partir du saccule via le conduit reuniens (canal de Hensen).

Le canal cochléaire suit les spirales de la cochlée osseuse et se termine sous la cupule cochléaire. Le canal cochléaire membraneux étant plus fin que la cochlée osseuse, il divise cette dernière en deux parties : la rampe tympanique, située dans la région basale, et la rampe vestibulaire, située dans la région apicale. La rampe tympanique communique avec la rampe vestibulaire au niveau de l'apex du modiolus, un point connu sous le nom d’hélicotrème. L'extrémité distale de la cochlée évacue sa périlymphe via l'aqueduc de la cochlée (alias canalicule de la cochlée) dans l'espace subarachnoïdien, juste en dessous du méat acoustique interne, dans le segment antérieur du foramen jugulaire.

Une coupe transversale de la cochlée révèlera l'appareil microscopique qui permet la conversion de l'énergie vibratoire en impulsions neuronales. Dans une spire cochléaire donnée, trois espaces peuvent être distingués. La lame spirale se projette horizontalement dans le canal cochléaire. Une bande membraneuse, appelée paroi ou membrane vestibulaire du canal cochléaire (membrane de Reissner en ancienne nomenclature), chemine obliquement de la surface apicale de la lame spirale jusqu'à la cochlée osseuse. Une deuxième membrane, appelée membrane basilaire ou bien encore membrane spirale du canal cochléaire, s'étend horizontalement du sommet de la lame spirale jusqu'à la cochlée osseuse. Les membranes vestibulaire et basilaire sont reliées le long de la cochlée osseuse par le ligament spiral de la cochlée.

La rampe vestibulaire est située supéromédialement à la membrane vestibulaire du canal cochléaire, au-dessus de la lame spirale. La rampe tympanique, quant à elle, est située en dessous de la membrane basilaire. L’espace restant entre les trois membranes précédemment mentionnées, ayant la forme d’un secteur de disque, correspond au canal cochléaire contenant l’endolymphe. C’est là que se situe l’organe spiral de Corti, l’épithélium sensoriel pilier du sens de l’ouïe. L'organ spiral consiste de cellules cilliées (une couche de cellules ciliées internes — CCI — et trois couches de cellules ciliées externes — CCE) suspendues à des cellules de soutien, les cellules de Deiters. Les cellules de Deiters sont elles-mêmes entourées d'autres cellules de soutien de différents types : les cellules de Hensen, de Boettcher, et de Claudius. L’ensemble est recouvert par la membrane tectoriale.

Vestibule

Récessus et communications

Le vestibule est une cavité creuse située entre la cochlée et les canaux semi-circulaires, médialement à la cavité tympanique, postérieur à la cochlée et antérieur aux canaux semi-circulaires. Il possède trois récessus :

Le récessus elliptique, proche de l’ampoule des canaux semi-circulaires antérieur et latéral
Le récessus cochléaire, adjacent à la cochlée
Le récessus sphérique (dit aussi récessus sacculaire), adjacent à l’ouverture de la rampe vestibulaire

Six orifices s'ouvrent dans le vestibule : cinq appartiennent aux canaux semi-circulaires et un provient de la rampe vestibulaire de la cochlée. De plus petites ouvertures existent sur le côté adjacent au méat acoustique interne. Celles-ci servent de passage pour la partie vestibulaire du nerf crânien VIII (nerf vestibulocochléaire). Le vestibule communique avec l'oreille moyenne via la fenêtre vestibulaire (fenêtre ovale). Elle est recouverte par la base du stapes ainsi que par son ligament annulaire.

Structures contenues

Les composants membranaires du vestibule sont le saccule et l’utricule. Le saccule est une petite cavité fibreuse qui communique sur sa portion inférieure avec le canal cochléaire via le le conduit réuniens. L’utricule est lui aussi une cavité fibreuse ; il communique avec les canaux semi-circulaires. Le saccule est situé dans le compartiment antéro-inférieur du vestibule, tandis que l’utricule en occupe la portion postérosupérieure. À proximité du point où les parois des deux cavités se rejoignent, chacune émet un petit conduit qui fusionne avec l’autre pour former une structure en forme de Y. La longue tige du « Y » est le canal endolymphatique qui traverse l’aqueduc du vestibule et se termine par le sac endolymphatique, en profondeur sous la dure-mère dans la cavité crânienne postérieure.

À noter que le labyrinthe membraneux est un système fermé, ce qui implique que l’endolymphe est évacuée des canaux par réabsorption au niveau de l'épithélium du sac endolymphatique. Une zone d’épithélium neurosensoriel spécialisé, la macula, tapisse les parois médiales de chaque saccule et le plancher de chaque utricule. Elle permet la détection de l’accélaration linéaire de la tête. L’orientation de la macula dans l’utricule la rend particulièrement sensible aux accélérations linéaires dans le plan horizontal, tandis que la macula située dans le saccule est plus sensible aux accélérations dans le plan vertical (p. ex. la force gravitationnelle).

La surface épithéliale de chaque macula auditive est caractérisée par des cellules dotées de stéréocils et d’un kinocile proéminent. Ces cellules sont recouvertes d’une structure gélatineuse connue sous le nom de membrane otolithique ou statoconiale qui abrite plusieurs petits cristaux, les otolithes (du grec oto, qui signifie “oreille” et lithos, qui signifie “pierre”). Une accélération linéaire au niveau de la tête provoque un retard de la membrane otolithique en raison de l'inertie produite par sa densité, ce qui conduit à l'activation ou à l'inhibition des cellules ciliées mécanoréceptrices.

Structures semi-circulaires

Trois structures osseuses semi-circulaires se projette du vestibule dans trois directions différentes :

Le canal semi-circulaire supérieur (antérieur) se projette verticalement et perpendiculairement à la partie pétreuse de l'os temporal
Le canal semi-circulaire postérieur s'étend également verticalement, mais le long de l'axe vertical de la partie pétreuse de l'os temporal
Le canal semi-circulaire latéral se projette presque horizontalement et latéralement par rapport à la partie pétreuse de l'os temporal

L’extrémité de chaque canal possède un élargissement appelé ampoule osseuse. Les ampoules des trois canaux s'ouvrent indépendamment dans le vestibule. Les extrémités non ampullaires des canaux antérieur et postérieur fusionnent pour former la branche osseuse commune. L'extrémité non ampullaire du canal semi-circulaire latéral est connue sous le nom de branche osseuse simple.

À l’instar des autres structures membranaires, les canaux semi-circulaires sont moins volumineux que le labyrinthe osseux qu’ils occupent. La seule exception à cette règle se situe dans la zone des ampoules membraneuses, qui occupent la quasi intégralité du volume de l’ampoule osseuse. Les trois extrémités ampullaires ainsi que les extrémités non ampullaires du canal semi-circulaire s’ouvrent dans l’utricule. Le côté médial de chaque extrémité ampullaire des canaux semi-circulaires possède une crête transverse qui abrite un neuroépithélium sensoriel spécialisé sensible à l'accélération angulaire de la tête.

Tout comme les maculas auditives du saccule et de l’utricule, le neuroépithélium sensoriel de la crête transverse est recouvert d’une structure gélatineuse, la cupule. La densité de la cupule fait qu’elle tend à rester stationnaire lors des mouvements de la tête, ce qui permet l'activation ou l'inhibition des cellules ciliées mécanoréceptrices du neuroépithélium.

Ce quiz vous permettra de vous mettre au défi pour identifier les structures de l’oreille interne.

Vascularisation

Artères

L'artère basilaire, formée par la fusion des artères vertébrales gauche et droite, réside dans le sillon basilaire de la région ventrale du pont. Cette artère donne souvent naissance à une artère labyrinthique (artère auditive interne) juste au-dessus de l'origine anatomique du nerf crânien VI, au niveau de la jonction pontomédullaire. Il arrive aussi que cette artère prenne naissance au niveau de la première branche de l'artère basilaire, l'artère cérébelleuse inférieure antérieure (AICA). L'artère pénètre dans l'oreille interne par le méat acoustique interne, où elle se ramifie en divisions cochléaire et vestibulaire de l'oreille interne. L'artère stylomastoïdienne (branche soit de l'artère auriculaire postérieure ou d’une ramification occipitale de l'artère carotide externe) fournit un apport sanguin supplémentaire à l'oreille interne.

Veines

Le drainage veineux s'effectue via les veines labyrinthiques, qui traversent le méat acoustique interne pour déverser leur contenu dans le sinus pétreux inférieur et supérieur (avec une certaine variabilité interindividuelle) ou dans le sinus transverse. Des veines inconstantes traversent également l'os pétreux pour évacuer le sang vers les sinus pétreux.

Innervation

Le nerf vestibulocochléaire (VIII) assure l'innervation sensorielle de l'oreille interne. Immédiatement après avoir quitté le méat acoustique interne, le nerf vestibulocochléaire se divise en deux branches : le nerf cochléaire et le nerf vestibulaire. Le nerf cochléaire se dirige en spirale vers la cochlée, où il donne des branches à travers les spires du canal cochléaire. Certaines fibres divergent ensuite pour former les ganglions cochléaires dans le modiolus de la cochlée. Les fibres nerveuses de ces ganglions traversent la lame spirale osseuse, et leurs dendrites communiquent avec les stéréocils de l’organe spiral de Corti.

Après avoir bifurqué du nerf crânien VIII, le nerf vestibulaire se divise à nouveau pour former une branche supérieure (nerf utriculaire et nerfs ampullaires antérieur et latéral) et une branche inférieure (nerf sacculaire), chacune dotée de son propre ganglion vestibulaire. Les fibres du ganglion vestibulaire supérieur innervent les ampoules des canaux semi-circulaires antérieur et latéral, ainsi que l'utricule. L'ampoule du canal semi-circulaire postérieur ainsi que le saccule sont innervés par les fibres du ganglion vestibulaire inférieur.

À noter que le nerf facial (VII) traverse le méat acoustique interne aux côtés des vaisseaux labyrinthiques et du nerf vestibulocochléaire (VIII). En revanche, le nerf facial n’innerve aucune structure de l’oreille interne.

Points clés

L'oreille interne est enchâssée dans la partie pétreuse de l'os temporal, en avant et latéralement de la fosse crânienne postérieure, avec la paroi médiale de l'oreille moyenne, le promontoire, servant de paroi latérale. Elle est composée d'un labyrinthe osseux qui entoure un labyrinthe membraneux.
La cochlée est une structure spiralée qui se termine par la cupule cochléaire. Le canal spirale autour d'un pilier osseux appelé modiolus. La cochlée contient le canal cochléaire. Ce dernier est divisé en deux parties : la rampe tympanique et la rampe vestibulaire. Chaque spire cochléaire contient une membrane vestibulaire du canal cochléaire (membrane de Reissner en ancienne nomenclature) et une membrane basilaire. L'espace entre ces membranes est rempli d'endolymphe et abrite l'organe spiral de Corti, qui contient des stéréocils.
Le vestibule est une cavité creuse située entre la cochlée et les canaux semi-circulaires. Il contient trois récessus et deux parties membraneuses : le saccule et l'utricule. Le saccule communique vers le bas avec le canal cochléaire, tandis que l'utricule communique avec les conduits semi-circulaires. Tous deux contiennent un épithélium neurosensoriel appelé macula, caractérisé par des stéréocils et un kinocil.
Trois structures osseuses, les canaux semi-circulaires, émergent du vestibule dans trois directions différentes : supérieure, postérieure et latérale. À l'extrémité de chaque canal se trouve une sorte de dilatation appelée ampoule osseuse, qui s'ouvre dans le vestibule. L'aspect médial de chaque extrémité ampullaire des canaux semi-circulaires présente une crête transverse qui abrite un épithélium neurosensoriel spécialisé qui détecte l'accélération angulaire de la tête.
L'apport artériel de l'oreille interne est assuré par l'artère labyrinthique (ou artère auditive interne), une branche de l'artère basilaire.
L’innervation se fait via le nerf vestibulocochléaire, qui se divise en deux branches : le nerf cochléaire et le nerf vestibulaire.

Sources

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Références:

Rouvière, H., & Delmas, A. (2002). Anatomie humaine : Descriptive, topographique et fonctionnelle (15e éd., Tomes 1-5). France: Editions Masson.
Kamina, P. (2006). Anatomie Clinique (4e éd., Tomes I-V). France: Editions Maloine.
Moore, K. L., Agur, A. M. R., Dalley, A. F., & Dhem, A. (2011). Anatomie médicale : Aspects fondamentaux et applications cliniques (3e éd.). Belgique: DE BOECK SUP.
Drake, R. L., Vogl, A. W., Mitchell, A., Duparc, F., & Duparc, J. (2020). Gray's Anatomie - Le Manuel pour les étudiants (4e éd.). France: Elsevier Masson.

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Kim Bengochea, Université Regis, Denver

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